Sur le panneau du poste de secours, l’orage était annoncé pour 19h, mais il ne se décide pas à éclater. Le soleil fait une tentative de retour et l’eau, à l’embouchure de l’Adour, étincelle un instant comme les faibles vagues qui roulent vers la plage interdite à la baignade.
Il est impossible de résister au désir de parcourir la jetée, comme on marche le long d’un train au départ, même si l’on sait qu’il faudra le laisser partir, comme s’en va la mer aussi. On reste au bord du lointain, on s’y s’arrête un moment avant de faire demi-tour.
Ici, seuls les chiens se baignent pour aller chercher sur l’eau un morceau de bois flotté jeté par leur propriétaire. Il y a souvent un vélo qui roule en contrejour. Les pêcheurs silencieux ne remuent que lorsque l’un deux fait une prise, et s’attroupent alors autour de lui, volubiles. Des couples mettent à l’épreuve leur désir de continuer à être des couples, le temps d’un aller et retour tout au bout là-bas. Elle dit : ça ne peut plus durer, ou bien lui : tu sais, on n’est pas obligés. D’autres avancent dans l’évidence l’un de l’autre et pensent à leurs enfants qui font de grands voyages. D’autres encore vont seuls, dans la belle solitude de leur vie qui fait une pause ici. S’ils ont le goût d’observer les couleurs, ils notent le vert et le rouge vifs des amers, et toutes les nuances du ciel d’un orage qui ne vient décidément pas.
Bateau en partance comme d’autres humains…